Des lectures
Même si la philosophie n'est pas seulement une discipline littéraire - on s'appuie aussi beaucoup sur les sciences - c'est une discipline où on lit des textes, des extraits ou des oeuvres. Voici donc pour les curieux une bibliographie sélective (celle de Mme Mandon pour rendre à César ou plutôt Cléopâtre ce qui lui appartient mais elle convient aussi aux autres professeures...), elle est indicative : vous pouvez piocher dedans et vous cultiver. Les textes sont parfois un peu ardus et il n'est pas toujours facile de lire un texte argumentatif, voire pour certains démonstratif. On lit un crayon à la main, on prend des notes, parfois on ne comprend pas et ce n'est pas grave... on avance à son rythme et on n'hésite pas à questionner les professeures si on a des difficultés... Nous-mêmes nous avons fait cette expérience autrefois. Parfois on abandonne et on revient... parfois on trouve aussi dans ces lectures clarification de questions que l'on se pose, parfois on trouve aussi un auteur ou une autrice qui nous accompagnera longtemps.
Beaucoup de ces textes sont disponibles au CDI. Empruntez-les.
Une série de podcasts intéressants à écouter au sujet de la lecture philosophique ou en philosophie ici.
Philo / bibliographie à l’usage des élèves de terminale
Avertissement
Cette bibliographie très sélective ne se veut ni exhaustive ni même juste !
Elle témoigne du hasard des lectures, et surtout des coups de coeur de votre professeure, particulièrement pour les rubriques 2 et 3.
J'ai indiqué" avec* les petits ouvrages jugés particulièrement utiles et stimulants. Faciles d'accès et courts, ils sont une belle et efficace manière d'entrer dans la philosophie pour des lecteurs occasionnels (ou pas), non avertis mais simplement curieux.
1/ Œuvres classiques de la philosophie
Platon
Premiers dialogues :
Apologie de Socrate*, récit du procès de Socrate. Bonne intro à la pensée du premier philosophe.
Criton, réflexion sur le respect dû aux lois.
Phédon, mise en scène des derniers instants de la vie de Socrate : discussions autour de l’immortalité de l’âme, de la réincarnation.
Le Banquet, six discours sur l’amour, dont le fameux discours d’Aristophane (mythe des androgynes)
Protagoras, dialogue très riche, sur la sophistique et bien d’autres sujets (on y trouve le mythe de Prométhée).
Dialogues de la maturité :
Gorgias, sur la rhétorique et ses liens (ou pas) avec la vertu.
La République, sur la justice. Ouvrage majeur de Platon, organisé en 10 livres (le livre 7 comporte la fameuse « allégorie de la caverne »).
Aristote
- Éthique à Nicomaque (10 livres qui traitent du bien suprême : le bonheur)
- La Politique. On pourra commencer par les deux premiers livres qui traitent de l’homme comme « animal politique »)
- Métaphysique. Comme l’indique le titre, l’ouvrage traite de questions « au-delà » de la physique, c’est-à-dire des « premiers principes », mais aussi du « premier moteur », et de l’« être en tant qu’être ». Au livre Gamma (alphabet grec), Aristote déontre le « principe de contradiction et en déduit celui du tiers exclu.
Épicure
- Maximes principales
- Lettre à Ménécée* (courte et aisée, un condensé de philosophie morale épicurienne)
Sénèque
- De la brièveté de la vie (réflexion stoïcienne sur la finitude)
Épictète
- Manuel*, Outre un bon manuel de survie en temps de crise, ce petit ouvrage est un condensé de stoïcisme, et une excellente et stimulante introduction à cette école antique !
- Entretiens, la même chose en plus long et plus détaillé.
Descartes
- Discours de la méthode, « pour bien conduire sa raison et rechercher la vérité dans les sciences ». Vous comprendrez comment Descartes en vient à son fameux « je pense, donc je suis ».
- Méditations métaphysiques (6 méditations assez courtes). L’auteur y fait l’expérience du doute radical, et conseille lui-même (moi aussi) de lire une méditation par jour (sur 6 jours, donc): bel exemple de… méditation philosophique !
Machiavel
- Le Prince (1513). Ouvrage de référence en philosophie politique, incarnation du réalisme politique. Comment prendre le pouvoir et le conserver ? « La fin justifie les moyens »... Vous comprendrez ce que signifie l’adjectif « machiavélique » !
Thomas More
- L’Utopie (1516). Description d’une île imaginaire, envers idéal de la société anglaise de l’époque. Bel exemple d’idéalisme politique, tout le contraire du Prince de Machiavel ! Lecture facile.
Spinoza
- L’Éthique, le plus célèbre ouvrage de l’auteur, organisé selon un « modèle géométrique ».
- Traité théologico-politique, préface intéressante sur la séparation entre raison et foi, chacune ayant son domaine propre. Piocher parmi les chapitres relativement courts (par exemple, le 6è sur les miracles, le 7è sur l’interprétation de l’Écriture, le 20è sur la liberté de pensée…)
Hobbes
- Léviathan. L’auteur y pense une théorie du contrat social, et défend un pouvoir politique absolu.
Locke
- Second traité du gouvernement civil. L’auteur y pose les fondements du libéralisme politique.
- Lettre sur la tolérance, sur la tolérance religieuse (liberté de culte).
Pascal
- Pensées, apparemment facile d’accès grâce à son vocabulaire élémentaire et à son caractère fragmenté (les fragments sont organisés en thèmes, ce qui permet une grande liberté d’approche), mais profond !
Rousseau
- Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, critique des inégalités et vision pessimiste de la société (thèmes de l’amour-propre, de la pitié naturelle, du bon sauvage…)
- Le Contrat social, référence en philosophie politique : réflexion sur les fondements de l’autorité politique (thèmes : démocratie, volonté générale, égalité politique de tous les citoyens...).
Kant
- Fondements de la métaphysique des mœurs. Ouvrage de philosophie morale, une référence pour penser le « devoir » : clair et rigoureux, plus accessible que les trois critiques du même auteur.
- Critique de la raison pure. Gros ouvrage majeur sur la théorie de la connaissance, difficile d’accès, mais on pourra se contenter de lire la préface (beaucoup plus lisible) à la seconde édition de 1787, sur la révolution copernicienne en philosophie.
Hegel
- Esthétique (reprises des cours de l’auteur sur l’art, pour cette raison accessible)
- La Raison dans l’histoire (vision téléologique de l’histoire, reprise des cours de l’auteur, donc également accessible)
Mill,
- L'utilitarisme. C'est en cherchant le bonheur du plus grand nombre qu'on trouve le sien. Un classique de morale utilitariste !
Marx,
- Manuscrits de 1844, on y trouve (entre autres !) des analyses de l’aliénation au travail.
Marx et Engels,
- Manifeste du parti communiste, un « classique » court et accessible.
- Critique de la philosophie du droit de Hegel, où l’auteur entend renverser l’idéalisme hégélien. Dans l'introduction, il critique la religion comme « opium du peuple ».
Nietzsche
- Ecce homo, un des derniers ouvrages de l’auteur, où il se présente lui-même. Bonne intro à la pensée démystificatrice de cet auteur dit « du soupçon ».
- Le Gai savoir (recueil d’aphorismes)
- Ainsi parlait Zarathoustra, beau mais difficile, sorte de long poème philosophique en prose.
- La Généalogie de la morale, ouvrage passionnant sur l’origine (pas très morale) de la morale…
Henry David Thoreau,
- Résistance au gouvernement civil, réflexion sur le droit/devoir de désobéir, et sur la résistance passive comme moyen d'action politique.
Bachelard
- La formation de l’esprit scientifique. Ouvrage d’épistémologie, vous y trouverez les fameuses notions de « crise » et d’« obstacle épistémologique ».
Freud
- Introduction à la psychanalyse (comme l’indique le titre, c’est une bonne intro…)
- Cinq leçons sur la psychanalyse (analyses de cinq « cas »... passionnants !)
- Le rêve et son interprétation
- Essais de psychanalyse (plus tardif et pointu, on y trouve plusieurs essais sur la guerre, la pulsion de mort, la pulsion grégaire, le principe de plaisir,..…)
Alain
- Propos, recueils de courts fragments (1 à 2 pages par fragment) sur tous les sujets propres à susciter la réflexion philosophique. Les propos sont regroupés par thèmes (sur l'éducation, sur l'art, sur les pouvoirs…) À goûter sans modération.
Bertrand Russell (mathématicien, logicien, philosophe épistémologue)
- Science et religion : une synthèse brillante et drôle de l'histoire des rapports entre science et religion, et une occasion de comprendre la nature de l'une et de l'autre. Bourré d'anecdotes, très documenté au plan historique.
Sartre
- L’Être et le néant, ouvrage majeur de Sartre, mais un peu jargonneux. À parcourir. Vous y trouverez, entre autres, quelques beaux passages sur le regard ou la mauvaise foi.
- L’Existentialisme est un humanisme *, ouvrage beaucoup plus « light » et facile d’accès, lecture stimulante (conférence de l’auteur, dans laquelle il défend sa théorie existentialiste).
S. de Beauvoir
- Le Deuxième sexe, en 2 tomes. « On ne naît pas femme, on le devient », ainsi s'ouvre le t. 2 (plus concret que le premier). Une philosophie existentialiste et féministe. Un ouvrage fondateur, et une référence toujours d'actualité pour de nombreux féminismes et pour les études de genre.
M. Foucault
- Histoire de la sexualité en 3 volumes (1- la volonté de savoir 2- le souci de soi 3- l’usage des plaisirs).
- Surveiller et punir, réflexion sur la naissance de la prison, emblème d’une société de surveillance, et sur le système pénal.
H. Arendt
- Eichmann à Jérusalem, sur la banalité du mal. Réflexion née du suivi du procès d'Eichmann.
- Les Origines du totalitarisme, une référence sur le sujet, très intéressant des points de vue philosophique et historique.
Cl. Lévi-Strauss (ethnologue)
- Race et histoire. Petit ouvrage critique de l’ethnocentrisme et de la notion de progrès.
- Tristes tropiques, récit de l’expérience de l’auteur en forêt amazonienne.
P. Bourdieu (philosophe et sociologue)
- La Distinction. Entre autres thèmes, l’art comme moyen de la distinction sociale, les habitus, la critique sociale du jugement de goût. Passionnant, malgré une écriture ardue (paradoxal, pour quelqu’un qui critique la langue comme vecteur de sélection).
- La domination masculine. Très éclairant (malgré l’écriture, toujours), l’ouvrage démonte les mécanismes de cette domination-là…
2/ Philosophie contemporaine
Frans de Waal, L'Âge de l'empathie, 2009
L'auteur (primatologue, docteur en biologie et professeur de psychologie) remet en cause le dogme économique de la compétition soi-disant conforme aux lois de l'évolution. Nourrie d'histoires animales, son essai montre au contraire le rôle fondamental de l'empathie et de la solidarité dans la nature. Des leçons dont nos sociétés devrait s'inspirer ?
Vinciane Despret, Que diraient les animaux si on leur posait les bonnes questions ? 2012
Passionnant essai d'éthologie et de philosophie. Une réflexion sur nos idées reçues à propos des animaux… et des hommes.
Jean-Michel Besnier, Demain les posthumains, 2009
« Le futur a-t-il encore besoin de nous ? ». L'homme devra-t-il bientôt céder la place à des créatures inventées par lui ? Réflexion sur le transhumanisme et l'intelligence artificielle.
Antonio R. Damasio, L'erreur de Descartes, 1994
Raisonner n'est pas calculer. L'auteur (l'un des plus grands spécialistes mondiaux du cerveau) s'appuie sur les recherches en neurologies pour montrer le rôle fondamental des émotions dans nos raisonnements et prises de décisions.
Elsa Dorlin,
- Sexe, genre et sexualités, 2008
Une bonne introduction aux études sur le genre, documentée et appuyée sur les théories féministes des 40 dernières années.
- Se défendre, une philosophie de la violence, 2017
Une histoire passionnante de la légitime défense comme arme politique, depuis les résistances esclaves aux patrouilles queer, en passant par l'insurrection du ghetto de Varsovie, les Black Panthers et le ju-jitsu des suffragistes…
Ruwen Ogien,
- L'Influence de l'odeur des croissants chauds sur la bonté humaine, 2011.
Analyses d'expériences de pensées. Une invitation à penser la morale autrement, et à entrer dans le débat éthique.
Michel Terestchenko, Un si fragile vernis d'humanité, banalité du mal, banalité du bien, 2005
Comment expliquer la facilité de certains hommes à entrer dans le mal ? Complétant les travaux d'Arendt sur Eichmann, s'appuyant sur les dernières recherches en psychologie sociale et sur des exemples historiques éclairants, l'auteur nous aide à comprendre autrement les ressorts du mal et du bien.
Harmut Rosa,
- Aliénation et accélération, 2010
Essai mêlant sociologie et philosophie. Plus les moyens technologiques permettent de gagner du temps, plus nous avons l'impression d'en manquer. Tentative de compréhension d'un paradoxe, et réflexion sur les nouvelles formes d'aliénation liées à l'accélération.
- Rendre le monde indisponible, 2018
Prolongement du précédent ouvrage. Un engagement à réinventer notre rapport au monde.
Jonathan Crary, 24/7, Le Capitalisme à l'assau du sommeil, 2014
Jouissif et salutaire essai sur le sommeil comme acte subversif, à une époque où le capitalisme rêve de faire de nous des travailleurs, consommateurs, joueurs et blogueurs insomniaques. Le tout appuyé sur des références philosophiques, de films et d'oeuvres d'art.
Didier Eribon, Retour à Reims, 2009
A travers l'analyse bouleversante de sa propre histoire, le sociologue livre une réflexion sur la sexualité, la reproduction sociale, le système éducatif, les rapports de classe, les différentes formes de domination et donc de résistance. Une autobiographie en même temps qu'un grand livre de sociologie !
Olivia Gazalé, Le mythe de la virilité, un piège pour les deux sexes, 2017.
Une histoire de la domination masculine. Comment le mythe fondateur de la virilité a légitimé l'oppression des femmes, mais aussi de l'homme par l'homme. Une très instructive invitation à réinventer les masculinités.
Frédéric Worms, Les maladies chroniques de la démocratie, 2017
Sur les problèmes traversés par la démocratie, et les moyens de les surmonter. Réflexions éclairantes sur quelques maux contemporains : le cynisme, le racisme, l'ultralibéralisme.
Rutger Bregman, Utopies réalistes, 2017
Eradiquer la pauvreté, diminuer le temps de travail, instaurer un revenu universel sans condition, ouvrir les frontières… idéal mais pas irréaliste, selon l'auteur ! Cet essai optimiste, appuyé sur de nombreuses expériences réelles, nous invite à sortir de nos ornières intellectuelles pour inventer un monde meilleur.
3/ Ouvrages de vulgarisation
Jacqueline de Romilly, Les grands sophistes dans l’Athènes de Périclès.
Sur le contexte d’apparition de la philosophie en Grèce au Vè siècle av JC, et sur ce qui rapproche et distingue les « intello » de l’époque : les sophistes et les philosophes. Très éclairant !
Pierre Manent, Cours familiers de philosophie politique.
Une analyse des événements politiques du 20è s. écoulé : guerres, totalitarismes, droits de l'homme, luttes…
Allan Chalmers, Qu'est-ce que la science ? *
Génial ouvrage de vulgarisation où chaque page fera de vous des gens (encore) plus éclairés et intelligents ! Recommandé pour ceux qui se destinent aux sciences.
André Comte-Sponville, Le Bonheur, désespérément.
Une sagesse très accessible, inspirée des leçons d'Epicure, des stoïciens, du Bouddha, de Spinoza.
Luc Ferry, Apprendre à Vivre.
Bonne vulgarisation, où l'on fait l'expérience de la philosophie comme médecine de l'âme, à travers une présentation très claire de certains philosophes et courants philosophiques.
Henri Pena-Ruiz, Le Roman du monde, légendes philosophiques.
La philosophie à l'oeuvre à travers les légendes, mythes et récits célèbres.
4/ Outils
Christian Godin,
- La philosophie pour les nuls.
Bonne vulgarisation de l’histoire de la philosophie. Accessible et drôle.
- Le Bac de philo pour les nuls.
Entrée par les notions du bac. Mais le contenu est plus maigre et surtout plus scolaire – donc moins passionnant - que l'autre.
Ch. Demonque / É. Clément/ L. Hansen-Love / P. Kahn, La philosophie de A à Z.
Voilà un dico de philo meilleur que d’autres ! Un instrument pratique, fiable et utile (en plusieurs exemplaires au CDI)
Les curieux pourront aussi consulter la bibliographie proposée par les professeurs du lycée Henri IV à Paris ici.
Beaucoup d'ouvrages sont disponibles en version numérique sur le site Philosophie de l'académie de Grenoble.